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Ces chefs qui ne font pas de cinéma



Interviews / Vincent Braud * Photos / Kristo Bornet pour Le goût et les couleurs Publié dans le magazine Kostar n°33 - décembre 2012-janvier 2013


Ils ne se prennent pas pour des stars. Et ne rêvent pas forcément d’étoiles. Pourtant les voilà sur le podium 2013 des Tables de Nantes (*). Incarnant (malgré eux ?) le renouveau d’une cuisine qui se cherchait une identité. À défaut de faire du cinéma, ils se sont prêtés au jeu : qu’évoquent, pour eux, ces films qui parlent de cuisine ou de goût, de gastronomie ou de bouffe ? Ludovic Pouzelgues, Christophe François et Nicolas Guiet se mettent à table.


(*) L’édition 2013 des Tables de Nantes vient de sortir. À l’initiative du Voyage à Nantes et d’InterLoire, il offre une sélection de 97 restaurants à Nantes et dans sa région.




Ludovic Pouzelgues, Lulu Rouget
“Salé sucré, c'est un peu mon identité...”

Le Grand Restaurant

Ça me fait tout de suite penser aux étoiles. Ce n’est pas une question de taille, c’est une grande table. Je ne suis pas sûr qu’il y en ait encore beaucoup à l’avenir. Il s’agissait souvent d’entreprises familiales. On assiste à une période de transition… Quant aux étoiles du grand restaurant, ce n’est pas forcément un rêve.


Le Goût des autres

Le goût des autres, ce n’est pas le mien. Donc je compose. À la fois des choses dont je sais qu’elles seront appréciées, comme un chèvre travaillé avec du poisson fumé et des légumes plein de goût et de couleur, et puis des choses que j’aime faire découvrir, comme ce bœuf snacké avec du gingembre, des moules et une sauce câpres-anchois…


La Grande Bouffe

Ça évoque l’opulence, un côté rabelaisien… Pas trop mon truc.


L’aile ou la cuisse

Pour moi, le titre n’évoque pas forcément une volaille. Il y a là quelque chose de grivois, de malicieux. Perso, c’est plutôt la cuisse. Cela dit, c’est un film que j’adore. C’était une charge contre la cuisine industrielle, non ? De ce point de vue, un plaidoyer pour ce qu’on essaie de faire.

Salé sucré

C’est un peu mon identité. Le sucré, ce n’est pas du sucre ajouté, c’est le sucre naturel des fruits ou des légumes. Pour les lames de Saint-Pierre à la mangue et au chorizo, je ne vais pas “bricoler” la mangue… Elle doit parler toute seule.


Le Chocolat

Le chocolat, pour moi, c’est bien sûr quelque chose de gourmand mais aussi de sexy. Ce n’est pas un truc lourd. Je le vois davantage dans les dernières séquences d’un menu. Avec un pigeon, par exemple, le cacao, ça le fait !


Histoires de premiers

1er jour en cuisine : 18 septembre 2000 au Château de Noirieux, près d’Angers.

1ère création : je ne suis pas un créateur, je suis un interprète.

1er vin : souvenir ému d’un Château Guiraud 1968, un Sauternes 1er cru, chez des amis dans la Sarthe.

Lulu Rouget, 1 rue du Cheval blanc à Nantes. 02 40 47 47 98




Christophe François, Les Chants d’avril
“Une cuisine faite avec son cœur, ses mains, ses tripes...”

Le Grand Restaurant

Le grand restaurant, ce fut un dîner avec Véronique (ndlr son épouse) au George V. On avait dû réunir nos économies. C’est à la fois très classe et un incroyable souci du détail. On est reparti, chacun, avec un ballotin de mignardises. Et chacun avait précisément celles qu’il avait dégusté avant le café. Du grand art.


Le Goût des autres

Pour moi, il n’y a pas de cuisine sans beaucoup d’humanité. La cuisine, c’est une histoire de rencontres. Un produit ou un vin, j’ai besoin de connaître celui qui l’a fait. Ensuite, on fait partager ce qu’on a trouvé.


La Grande Bouffe

Ça évoque une fête avec des gens que j’aime bien. De temps en temps, on se fait une grande tablée avec des potes. Avec des terrines, des plats de famille et quelques bonnes bouteilles.


L’aile ou la cuisse

Ce n’est pas mon film préféré de De Funès. Je ne sais pas combien de fois j’ai pu regarder Ni vu ni connu. Pour le reste, je suis moi aussi un défenseur d’une cuisine faite avec son cœur, ses mains et ses tripes.


Salé sucré

Je suis d’abord salé. Un prof caractériel a failli me fâcher avec les desserts lorsque j’étudiais à Vatel. Je fais une pâtisserie de cuisinier comme le mille-feuilles ou les clafoutis. Pour le salé, j’aime beaucoup croiser les produits de la terre et de la mer, associer le poulet et les bulots, par exemple. Je me suis aussi amusé à proposer une formule “le cochon est dans les fraises”.


Le Chocolat

Noir, le chocolat, forcément. C’est quelque chose de tendre et de réconfortant. Pas en grande quantité mais de bonne qualité. On peut l’associer au salé, comme je le fais avec du poulet ou du cabillaud.


Histoires de premiers

1er jour en cuisine : au printemps 1995 cher Cazaudehore à Saint-Germain-en-Laye

1ère création : Mignon de veau et lotte, avec un jus d’huîtres et une purée à l’anis.

1er vin : un Saint-Nicolas de Bourgueil, découvert avec mon grand-père chez un de ses copains.

Les Chants d’avril, 2 rue Laënnec à Nantes. 02 40 89 34 76 www.leschantsdavril.fr




Nicolas Guiet, L’U.ni
“Je n'ai pas ouvert un restaurant...”

Le Grand Restaurant

C’est une caricature d’un monde dépassé, un côté has been pour moi. En fait, je n’ai pas ouvert un restaurant, j’ai ouvert une maison. On y vient pour bien manger bien sûr, mais aussi pour passer un bon moment.


Le Goût des autres

Ma cuisine, je la qualifie parfois de rassurante car on y retrouve des produits familiers, et de surprenante car j’y apporte, par une association ou un assaisonnement, une touche inattendue. Je ne suis pas là pour faire partager ou manger une technique. J’ai envie de faire partager une émotion.


La Grande Bouffe

Soit c’est une bouffe entre potes et là, c’est convivial. Sinon il y a, pour moi, un côté mal-bouffe sans notion de plaisir.


L’aile ou la cuisse

Les deux, mon capitaine ! Et, pour ce qui est de la volaille, on est verni dans la région. C’est notre péché mignon du dimanche midi, le poulet-frites avec toute l’équipe. Ce qui me permet de redire que, dans ce métier, la réussite est toujours collective. Il y a eu, sans doute, une génération de chefs qui a dégoûté pas mal d’apprentis cuisiniers… Le plaisir, on le partage avec le client mais aussi avec une équipe.


Salé sucré

C’est indissociable. Il n’y a pas de sucré sans salé. Je suis cuisinier, donc je fais une pâtisserie de cuisinier. Même si, quand j’étais enfant, je faisais des gâteaux et des desserts pour la famille, puis les voisins… Aujourd’hui, je m’amuse à mettre, par exemple, du butternut ou du piment d’Espelette dans les desserts.


Le Chocolat

C’est une force, un équilibre et une gourmandise. Je ne suis pas un grand fan de chocolat mais c’est génial pour apporter de l’amertume et de la puissance à un plat.


Histoires de premiers

1er jour : au printemps 1998, à Sainte-Anne-la-Palud

1ère création : une charlotte aux fraises quand j’étais môme

1er vin : une bouteille de la cave de Lise et Bertrand Jousset, à Montlouis-sur-Loire.

L’U.ni, 36 rue Fouré à Nantes. 02 40 75 73 05


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