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Carte blanche à Noé Soulier


Noe Soulier © Willfried Thiery - Cndc


Directeur du Cndc depuis 2020, le chorégraphe Noé Soulier est invité dans le In du Festival d’Avignon 2024. Après avoir créé pour la Trisha Brown Dance Company, il présente Close Up qui nous reviendra ensuite à Angers puis en tournée. L’occasion de lui donner carte blanche dans ce Kostar été.


Se surprendre soi-même

Close Up prolonge la recherche menée dans mes deux derniers projets : le film de danse Fragments et la pièce First Memory. Les phrases de mouvement sont construites par improvisation à partir de tâches extrêmement précises. J’essaie de déjouer l’aspect prévisible d’une improvisation spontanée, où les habitudes motrices des danseur·euses se déploient librement, comme celui d’une écriture planifiée, limitée par mes propres automatismes compositionnels.


Lorsqu’un·e interprète parvient à créer consciemment des situations où sa spontanéité ne peut s’appuyer sur des schémas établis, une dimension plus profonde et plus intime de son approche du mouvement s’exprime : iel se sauve d’une situation qu’iel a construite et fait ainsi émerger des transitions instinctives entre les mouvements qu’iel seul·e peut convoquer.   

Expressivité non narrative 

Le vocabulaire chorégraphique que je tente de développer n’est pas purement abstrait. Il s’appuie sur des actions pratiques détournées de leur but d’origine comme attraper, éviter, frapper ou lancer. Les buts qui motivent ces actions sont masqués par de nombreuses distorsions : absence des objets visés, parties du corps inadaptées, combinaisons de direction inorganiques…   


Ces actions détournées portent une charge affective et émotionnelle que n’ont pas des mouvements purement formels mais elles ne forment pas une chorégraphie narrative. Elles créent une forme d’expressivité non narrative. C’est précisément cette strate d’expressivité, qui se situe entre le mouvement formel et la fiction narrative, que je souhaite explorer. Celle-ci rejoint la collaboration musicale au cœur de la pièce.   


Polyphonie d'affects 

Les contrepoints de L’Art de la fugue de Johann Sebastian Bach ne sont pas construits sur un modèle de développement narratif comme peuvent l’être de nombreuses sonates, concertos ou symphonies du répertoire classique et romantique. Si leur structure polyphonique est extrêmement complexe et abstraite, les matériaux thématiques qu’ils mobilisent sont particulièrement expressifs.   


Je souhaite explorer la même tension entre matériaux chargés affectivement et construction polyphonique. Elle me semble permettre de saisir une dimension cruciale de notre expérience intime. Celle-ci ne connaît jamais la simplicité et la linéarité d’un schéma narratif. Au contraire, nos expériences les plus intenses comme les plus infimes sont complexes et polyphoniques. C’est cette dimension non linéaire de notre expérience affective que je souhaite sonder.    


Vidéo et microcosme chorégraphique 

Cette nouvelle création prolonge également sur scène la recherche menée dans le film de danse Fragments avec l’utilisation de la vidéo en temps réel. Dans ce film, j’ai positionné un cadre physique entre la caméra et les danseur·euses qui ne capturait que le centre de leur corps. Cela nous a permis de véritablement chorégraphier pour l’espace spécifique de la caméra au lieu de trouver des manières de filmer des phrases de mouvement préexistantes.  


Nous avons ainsi pu créer un microcosme chorégraphique où chaque détail – torsion du buste, inclinaison de la tête, position des doigts – prend une importance considérable.  


Pendant le tournage, il s’est avéré particulièrement intéressant d’observer le rapport entre l’action de danser pour la caméra et l’image générée par la danse. J’aimerais explorer le potentiel de cette approche de la chorégraphie filmée sur scène. Celle-ci offre un changement d’échelle radical qui permet d’être extrêmement proche des corps et de leur donner des proportions architecturales. La chorégraphie envahit ainsi la scénographie.   


Contrairement à un usage courant de la vidéo en danse, il ne s’agit pas ici de donner un autre point de vue sur une chorégraphie pensée pour la scène mais bien de confronter deux types de chorégraphie, une pour l’espace physique de la scène et l’autre pour l’espace bidimensionnel de la projection. Je cherche ainsi à générer une scène multiple ou plutôt une cohabitation de plusieurs scènes dans un même espace qui peuvent interagir différemment avec la musique.  


Close up, 9 et 10 octobre, Cndc, Angers.

18 et 19 janvier, Opéra de Rennes dans le cadre du Festival Waterproof

25 et 26 janvier, Opéra de Nantes dans le cadre du Festival Trajectoires.

28 janvier, Le Quartz, Brest



© Alexandre Guirkinger

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